RECAPITULATIF DES PERSONNAGES

Depuis qu'elle était môme, Sara avait toujours été un peu à part, un peu différente. Tout d'abord parce qu'elle n'avait pas de maman alors que tout le monde en avait une, même Stephanie Hawkins qui portait ses robes à pois et nattait ses longs cheveux roux très bizarrement. Sa maman aussi était un peu étrange d'ailleurs, avec ses grosses lunettes à écailles, mais au moins elle était là. Sara, elle, n'avait pas de maman. Son papa lui avait expliqué un jour qu'elle était montée au ciel pour faire naître une étoile et que l'étoile, c'était elle, Sara. Il lui avait montré une photo, celle qu'il gardait au salon sur la table avec l'horrible lampe de Tante Ann. Il y avait une dame sur la photo, grande et belle, en salopette. Elle portait une salopette en jeans que Papa avait promis de lui donner un jour parce que cette dame, c'était sa maman.

En grandissant, Sara avait compris que ce n'était pas uniquement l'absence de sa mère qui la mettait à part mais aussi la présence de son père, ou en tout cas son métier. Elle était devenue la fille du garagiste dont on se moque parce que ses baskets n'étaient pas vraiment le dernier modèle sur le marché et que la plupart de ses jeans avaient quelques trous. Heureusement, il y avait Chuck. Il avait un an de plus mais ils étaient dans la même classe et Chuck se fichait bien que Sara n'ait que son père ou que celui-ci occupe ses journées à réparer des voitures ou qu'il ne puisse pas offrir à sa fille une paire de Nike Air.

« You know, one day, we'll leave this place and all of them » lui avait confié Chuck, au cours de l'été de leur treize ans. Ils étaient allongés dans l'herbe, au lac Concordia, à faire des plans sur la comète et à profiter de ce qui restait de leur innocence. Le père de Chuck venait de se tirer, laissant derrière lui sa famille sans même manifester le moindre regret. L'enflure. Ils n'étaient jamais plus des enfants tous les deux et ils étaient tout à fait conscients que le bonheur, s'il pouvait se trouver à Ridgecrest, était sans doute ailleurs. Chuck voulait partir et Sara ne voulait pas être seule. Alors s'ils partaient, ce serait ensemble. Les années passant, ils avaient peaufiné leur projet, convaincus qu'ils quitteraient la ville sans jamais se retourner. Ni l'un ni l'autre n'avait imaginé que ça pourrait s'avérer plus compliqué que ça. Ils n'avaient pas pensé une seule seconde que la vie pourrait leur mettre des bâtons dans les roues. Ça avait commencé avec la mère de Chuck. Un cancer du pancréas, avait-on annoncé. Les médecins lui avaient donné quelques semaines, quelques mois tout au plus. Moins de deux mois après ça, Chuck se retrouvait seul. Enfin, non, pas tout à fait seul. Sara était là, comme elle l'avait toujours été depuis qu'elle avait huit ans. Il s'était mépris sur ses intentions à moment donné, perdu qu'il était dans son chagrin, et elle n'avait rien dit. Elle avait retourné ses baisers sans les apprécier et il avait une nouvelle fois mal compris. Ses sentiments à lui, ses sentiments à elle, cette situation à la con.

Ils étaient ensemble depuis quoi, six, peut-être sept semaines lorsqu'ils réalisèrent que quelque chose n'allait pas. Something was wrong. Non pas qu'ils n'étaient pas fait l'un pour l'autre, au contraire. Ils l'étaient, pour être amis en tout cas. Et Sara aimait les filles, avait-elle compris. Elle avait dix-neuf ans, plus vraiment de projet et personne à qui en parler. Si jamais elle confiait ça à quelqu'un, toute la ville serait au courant en moins de vingt-quatre heures alors qu'elle ignorait même comment le dire à son père. Elle ne pouvait pas. Alors elle garda ça pour elle et elle avança, tentant d'oublier le sourire triste de Chuck lorsqu'ils avaient rompu.

Funny how time seems to stop when you give up on your dreams. C'était, en tout cas, le cas pour Sara. Elle aurait aimé aller à l'université, dans une belle fac. Pas forcément intégrer l'une de l'Ivy League mais juste... aller à la fac et non pas prendre quelques cours du soir dans sa petite ville merdique. Elle  aurait aimé étudier le droit ou peut-être l'histoire, avoir un ou deux diplômes, enseigner probablement. Elle aurait aimé partir vivre à La Nouvelle-Orléans. Elle aurait aimé s'en aller avec Chuck et partager un appartement avec lui, en toute amitié. Ou vivre sur le même palier. Elle aurait aimé, oui, mais au lieu de ça, elle était coincée à Ridgecrest. Coincée. Paumée. Presque désespérée. 

cami hastings

Cami est la fille unique du seul oncle de Sara, son père ayant eu quatre sœurs et un seul frangin. Elles ne se sont jamais vraiment fréquentés, puisque Cami vit à La Nouvelle-Orléans. Enfin, vivait jusqu'à il y a quelques mois. Son père l'a envoyée à Ridgecrest dans l'espoir qu'elle arrête de faire des conneries. Il faut dire que Cami n'est pas vraiment une jeune fille des plus sages. Avant même d'avoir dix-huit ans, elle avait déjà séjourné deux fois dans un centre de redressements pour mineurs. Après l'avoir retrouvée complètement défoncée, son père a décidé de mettre un terme à ses errances et il l'a envoyée chez son oncle. Les premières semaines ont été difficiles, Cami étant très têtue et plutôt caractérielle. Sara et elle ont du mal à s'entendre, au départ. C'est toujours conflictuelle, certes, mais Sara s'ouvre peu à peu à sa cousine. Cami a compris qu'elle était mal dans sa peau, reste à comprendre pourquoi. Ce n'est pas chose aisée que de comprendre la petite brune mais elle est têtue et elle finit toujours par avoir ce qu'elle veut. Toutefois, Sara craint qu'elle n'ébruite son secret ; elle n'est pas prête à ce que tout le monde sache qu'elle aime les femmes.

chuck jones

Chuck et Sara se connaissent depuis qu'ils sont mômes. Ils ont un an de différence, c'est vrai, mais ça ne les a jamais empêché de s'entendre à merveille. Chuck n'a jamais prêté attention à ce que les gens disaient, que ce soit à son propos ou à celui de sa meilleure amie. Sara l'a toujours vu comme son meilleur ami, simplement son meilleur ami. Presque son frère, en fait. Seulement Chuck a pensé pendant un temps avoir des sentiments pour elle, lorsque sa mère est décédée. Inutile de dire qu'il était perdu et qu'il a pris son soutien pour autre chose, quelque chose de plus profond et il l'a embrassé alors qu'elle n'avait rien fait pour l'encourager. Ils sont sorti ensemble après ça, surtout parce que Sara a toujours été incapable de lui dire non. Ils sont restés ensemble quelques semaines avant de se rendre à l'évidence : leur couple était une blague, une bêtise. Rompre ne les a pas éloigné mais Chuck a compris que Sara n'avait pas vécu ça de son plein gré, pas vraiment. Il en a été attristé mais il s'en remet progressivement. Ça l'a toujours étonné qu'elle ne fréquente personne. C'est une fille géniale, drôle et en plus elle s'y connaît un peu en mécanique. Une nana parfaite. Il commence à se poser des questions, c'est vrai, mais il est loin d'imaginer qu'elle préfère les femmes. En fait, Sara n'en est même pas sûre elle-même. Elle est juste complètement paumée et ça, Chuck l'a senti.

célimène rosenbach

Proximorum cuius cruentae laesa exclamabant asperitati suspicionum cruentae periclitetur blanditiae vel quantitati incidentia asperitati a exclamabant exclamabant a quantitati velut quantitati dolere terrarum vita ubi dicebatur salute amplitudo quantitati vel a dicebatur a orbis inminuta quantitati et vita pendere blanditiae si iracundae imperii exclamabant pendere terrarum asperitati exclamabant dolere et salute orbis filo simulantium inminuta periclitetur imperii inpendio et salute terrarum blanditiae salute laesa exaggerantium orbis imperii proximorum terrarum amplitudo cuius suspicionum fictis eius periclitetur et simulantium principis filo pendere exaggerantium cuius dolere statum principis et a incidentia cuius cuius principis amplitudo pendere simulantium amplitudo exclamabant inpendio velut vita iracundae. Proximorum cuius cruentae laesa exclamabant asperitati suspicionum cruentae periclitetur blanditiae vel quantitati incidentia asperitati a exclamabant exclamabant a quantitati velut quantitati dolere terrarum vita ubi dicebatur salute amplitudo quantitati vel a dicebatur a orbis inminuta quantitati et vita pendere blanditiae si iracundae imperii exclamabant pendere terrarum asperitati exclamabant dolere et salute orbis filo simulantium inminuta periclitetur imperii inpendio et salute terrarum blanditiae salute laesa exaggerantium orbis imperii proximorum terrarum amplitudo cuius suspicionum fictis eius periclitetur et simulantium principis filo pendere exaggerantium cuius dolere statum principis et a incidentia cuius cuius principis amplitudo pendere simulantium amplitudo exclamabant inpendio velut vita iracundae.

Ça lui était tombé dessus comme un poing dans la gueule. Ils devaient rentrer, tous les deux. Leurs missions respectives touchaient à leur fin, ils allaient retourner à la maison. Ils devaient s'installer à Ridgecrest, où était née Amy. Elle était sensée rentrer d'abord, puis deux mois plus tard, ce serait son tour à lui, mais Amy n'avait pas eu le temps d'empaqueter ses affaires. Elle était morte. Morte dans une embuscade. Morte à trois jours de son départ d'Afghanistan. « We're sorry for your loss captain and we support you and your family » La voix du colonel était teintée de tristesse ; il estimait Amy, comme tout le monde ici. En tant que médecin du camp, elle n'avait jamais hésité à mettre les autres en avant, jamais. Daniel savait qu'elle était imprudente, intrépide. Ça avait fini par lui coûter la vie. « Eisenberg ? » Il releva la tête, croisant le regard du colonel. Il paraissait compatir sincèrement. Ces derniers mois, ils n'avaient subi que de très rares attaques, plutôt malhabiles et bancales. Tout le monde s'était cru en sécurité. Jusqu'à aujourd'hui. Avec Amy, étaient morts six hommes. Six autres familles en deuil mais ça le laissait de glace. Amy était morte. Daniel sentit son cœur se serrer ; il était incapable de compatir, alors que ces six hommes étaient ses camarades. Il avait perdu sa fiancée, c'était la seule pensée qui occupait son esprit. « Son, your departure has been advanced, you leave in two days, l'informa son supérieur, along with with lieutenant Sheffield » A la mention d'Amy, il ferma les yeux. Lorsqu'on lui avait appris qu'elle était tombée au combat, il avait cru devenir fou. Il avait eu beau tempêter, hurler, on ne lui avait pas laissé rejoindre la zone de l'embuscade. Il voulait la voir. Ce n'était que de longues heures plus tard que son corps et ceux des autres avaient été ramené sur le campement, dans un silence pesant. Par pudeur mais aussi par respect, on l'avait laissé seul avec elle. Il s'était effondré, à la vue de son corps sans vie. Plus jamais elle ne sourirait en le réveillant, plus jamais elle ne ronchonnerait parce qu'il avait oublié de remettre du lait dans leur réfrigérateur, plus jamais elle ne l'enlacerait furtivement le soir, au camp, à l'abri des regards. C'était fini, elle était partie.

Δ Δ Δ Δ
« You sure you want this job? » Le principal lui avait déjà posé cette question. Stoïque, Daniel hocha à nouveau la tête pour, quoi, la troisième fois ? Oui, quelque chose comme ça. « Sorry for insisting but you're really overqualified for this job, reprit le principal en baissant les yeux sur le curriculum vitae que lui avait apporté Daniel ainsi que son dossier, I'm almost sure you could apply at the university of New Orleans to teach literature. Why would you wanna work here? It's insane... » En effet, oui. L'armée avait payé ses études de lettres ainsi que diverses formations qui lui permettaient de prétendre à un poste de professeur, probablement en université comme le soulignait l'homme face à lui, mais ce n'était pas ce que Daniel souhaitait. Il avait besoin d'un job, certes, mais il se savait incapable de travailler dans une grande ville, face à une masse de visages anonymes. A l'époque où il faisait partie de l'armée, il prenait soin de connaître chacun de ses hommes, leur histoire et leur famille. Il voulait se sentir proche d'eux et il n'avait pas passé dix ans de sa vie à le faire pour ensuite tirer un trait sur ce principe.

Le principal se racla la gorge pour attirer son attention et Daniel réalisa qu'il s'était perdu dans ses pensés un instant. Avec un sourire bref, il reporta donc son attention sur son potentiel futur employeur. « You're too good to be true but welcome to Richmond High Mr. Rosenberg! » fit le proviseur joyeusement. Il se leva et Daniel l'imita avant de prendre la main qu'il lui tendait. Fut un temps où chaque fin de conversation avec son supérieur se ponctuait de sa main droite portée à la tempe mais cette époque-là était finie. Il n'était plus capitaine de l'armée américaine à présent mais professeur au lycée de Ridgecrest.

Δ Δ Δ Δ
Après trois ans passés à enseigner à Richmond High, Daniel s'était habitué aux regards de ses élèves et généralement, il n'y prêtait plus attention. Sauf lorsqu'il s'agissait de Meredith Fuller. Cette fille avait une manière d'observer les gens trop intense pour passer inaperçu. C'était un brin déstabilisant parfois. Relevant la tête des contrôles qu'il s'appliquait à corriger, il la découvrit dans l'encadrement de la porte, un sourire étrange aux lèvres. « Can I help you with something, Meredith ? » demanda-t-il, les sourcils légèrement froncés. Non pas qu'il ne l'appréciât pas mais cette fille était, comme certains de ses collègues l'auraient dit, un cancre. Il avait au départ pensé qu'elle feignait de ne pas comprendre mais non, elle ne comprenait vraiment pas ses cours. Il lui donnait donc quelques cours en plus, depuis deux ans. Prenant sa question comme une invitation, elle entra dans la salle de classe et vint se poster à ses côtés. « Yes. There's something you could explain to me... maybe » souffla-t-elle, déposant un livre sur son bureau non sans l'effleurer au passage. Daniel déglutit avec difficulté. Il n'avait jamais été très friand des contacts physiques et celui-ci... this one was just wrong. Il baissa les yeux pour lire le titre de l'ouvrage. Les Liaisons dangereuses. Où avait-elle trouvé ça ? Ce n'était même pas au programme. « I thought you could show me... some things to understand this » Sa voix était douce mais son ton n'avait rien d'innocent. Il ferma les yeux un instant, se rappelant qu'il s'agissait de son élève. Pas d'une femme, d'une élève. « Are you ok mister Eisenberg ? » s'enquit-elle. Il souleva les paupières pour la voir pencher sur lui, l'air faussement concerné. Dès que leurs regards se croisèrent, son sourire prétendument inquiet se transforma en un sourire presque victorieux. Il hocha vigoureusement la tête. « Yes, yes, I'm alright. I'll see what I can do for you but I'm busy right now Mer- miss Fuller. I'll talk to you... later » marmonna-t-il, replongeant le nez dans ses copies et manquant ainsi la mine joyeuse de la jeune fille. Bon sang. Une année. Une année scolaire et il n'aurait plus à se préoccuper de cette gamine.

meredith fuller

Meredith est l'une de ces adolescentes que tout le monde regarde, que beaucoup admirent et que de nombreux craignent. Elle est en haut de la chaîne alimentaire du lycée mais contrairement à ce qu'on pourrait penser, elle n'est pas arrivé là par hasard, précédé par la réputation de sa mère ou celle du porte-feuille de son père. Elle s'est faite toute seule, à Richmond High, et elle en est très fière. Très franchement, Daniel préférerait qu'elle soit fière de ses notes ou en tout cas qu'elle ait des raisons de l'être. C'est l'une de ses pires élèves et malgré toutes les heures supplémentaires qu'il a pu faire pour elle, elle ne semble toujours pas comprendre les bases lorsqu'il l'interroge oralement. Il n'est pas certain qu'elle triche durant les contrôles écrits, puisque le rendu n'est jamais bien excellent, mais c'est toujours correct. Le contraste entre les réponses à ses questions lorsqu'ils sont seuls et celles qu'elle écrit sur sa feuille l'a amèné à penser qu'il y a quelque chose de pas clair là-dessous mais il aurait mieux fait de ne pas y prêter attention. En effet, Meredith a une idée derrière la tête. Cette année est sa dernière à Richmond High et ça fait déjà trois ans qu'elle fantasme sur son professeur d'anglais. Cette année est pour elle l'occasion de passer à l'attaque. Elle est majeure, c'est tout à fait légal, même si ce serait très mal vu par le lycée mais après tout, personne n'a à savoir. Elle se contente de lui lancer quelques regards appuyés, de l'effleurer de temps à autre, mais sans jamais être provocante ou lui donner une quelconque raison de dire quoi que ce soit. Ceci dit, elle a la désagréable impression qu'il sera plus difficile à avoir que n'importe lequel des types avec lesquels elle est sortie au lycée. Pourtant, il paraît... well, il est réactif à ses avances, elle n'est pas idiote mais lui non plus d'ailleurs. Daniel sait très bien ce qu'il risque à se laisser aller à ce genre de choses. Il n'est pas ce genre de mecs et aussi mignonne que puisse être Meredith, elle reste son élève. Elle aura son diplôme de fin d'études à la fin de l'année, peut-être avec difficultés, mais elle l'aura et elle disparaîtra de sa vie avant qu'il n'ait la brillante idée de lui céder. Mais faut-il encore qu'elle passe, cette année.